Floride : Orlando FL, capitale mondiale des loisirs

Les statistiques sont formelles :

A Orlando, on compte davantage de parcs d’attractions au kilomètre carré que partout ailleurs dans le monde. En un demi-siècle, la ville en a fait son gagne-pain. Quelque 66 millions de visiteurs ont été enregistrés en 2015, record des USA, devant New York !
Si tout le monde connaît Disneyworld et l’Universal Orlando Resort, d’autres attractions, (nettement) plus surprenantes, sont apparues au fil du temps… Et chaque année, de nouveaux méga-projets voient le jour.
Suivez le guide, puis embarquez pour une plongée entre nostalgies floridiennes. Quartiers aux contrastes saisissants et nature (presque) vierge. Des facettes souvent ignorées d’Orlando, qui ne manquent pas de caractère.

Jadis,

Il n’y avait là qu’une savane piquetée de lacs et de palmettos. Ces jolis palmiers pas trop hauts aux bouquets touffus. Les colons descendus du nord au 19e siècle y ajoutèrent des vaches, des ranchs, puis des orangers par milliers. Le secteur y gagna son nom : Orange County.
Au premier boom des agrumes en succéda un second. Bien plus explosif : le land boom des années 1920 vit débarquer ses premiers wagons de Yankees attirés par ce « paradis terrestre » de publicité, au climat apaisant.

Patatras : en 1926,

La bulle spéculative implose. La Grande Dépression suit et tout s’écroule. Orlando retourne à ses vaches et ses orangers. Malgré quelques coups de pouce de l’armée américaine après-guerre, c’est en 1965, seulement, qu’a lieu la révolution : cette année-là, Walt Disney rafle secrètement 30 500 acres (123 km2) de terres. Au tarif plancher de 100 $ l’acre. Belle affaire. Bientôt, l’annonce est officielle : le père de Mickey s’embarque avec emphase dans la construction de la greatest attraction in the history of Florida.

La suite n’est que pure logique capitaliste.

Les prix de l’immobilier grimpent en flèche. La population décuple et, aujourd’hui, Orlando se retrouve à la tête d’une agglomération de 2,7 millions d’habitants !
Les Américains ont une expression parfaite pour désigner la situation. Boom town, comme on appelait jadis les villes champignons grandies dans le sillage des chercheurs d’or. Seule différence : ici, le filon ne semble pas près de se tarir.

La tête tourne.

Disney s’arroge à lui seul trois sorties sur l’autoroute I-4 pour desservir ses 4 parcs principaux. (Magic Kingdom, Epcot, Animal Kingdom, Hollywood Studios), où le portefeuille frise à chaque instant l’infarctus… L’Universal Orlando Resort, plus modeste, se contente d’une seule pour Universal Studios. Islands of Adventure et le parc aquatique Volcano Bay.

Axe majeur du fun,

I’Drive (International Drive), parallèle à l’I-4, étire ses 18 km entre 23 centres commerciaux majeurs. Des dizaines d’hôtels et motels, des centaines de restaurants et fast-foods. La formule magique, ici, c’est le buffet all-U-can-eat : chinois, brésilien, japonais et italien (d’opérette), homard, tout est à volonté – même les coups de feu au Capone’s Dinner & Show et les joutes entre chevaliers au Medieval Times… De tourist strip (l’axe touristique) à tourist trap (piège à touristes), il n’y a souvent qu’un pas !
Pour commencer cool, le choix ne manque pas. Un tour de kart, vroum vroum. Un minigolf en famille au Congo River Adventure, avec ponts de singe et vrais alligators en guise de crocodiles. La maison tête en bas de Wonderworks. Le Musée des squelettes, avec ses veaux à deux têtes, ses malformations diverses, son nain et son… centaure. Les 2 140 m2 du Golf Superstore. Le Halloween Megastore et le Port of Entry Christmas Shoppe pour bien préparer les fêtes (mais Marge’s fait mieux encore, plus loin, sur l’Orange Blossom Trail).
Pour attirer le chaland, une seule solution : en rajouter. Le Fun Spot America déroule le plus haut skycoaster du monde (chute presque libre de 91 m)… Broutille.

SeaWorld,

En déclin depuis que les activistes se sont mis en tête de libérer ses orques, a investi dans le frisson augmenté avec le grand huit Mako, un hypercoaster atteignant 117 km/h – sur lequel flotte avec fierté la bannière étoilée. Fastest, longest, tallest… les superlatifs pleuvent en attendant l’inauguration du Skyplex, des montagnes russes plus rapides encore, follement arrimées aux flancs d’une tour.

Exit 78, le cœur balance.

À gauche, shopping à gogo. À droite, Holy Land Experience, dans son palais fantasmé du roi David aux colonnes dorées… Dès le parking, une crèche XXL au poupon obèse donne le ton : kitsch et coloré. À l’intérieur : une copie « authentique » de l’arche d’alliance, des Jésus en carton, des soldats romains pas du tout crédibles, Jonas en compagnie d’une pieuvre animée dans les entrailles de la baleine… Et le fils de Dieu réincarné, qui baptise live sur scène, avant de se retrouver dûment crucifié et dégoulinant de jus de tomate. Mais à la sortie, les buissons taillés assènent le message : he is risen – il est ressuscité !

Exit 64,

Machine Gun America apporte la crowning touch (touche finale). Les enfants peuvent apprendre à y manier la mitraillette (100 $) à partir de 13 ans pour refroidir les effigies de Ben Laden. Trop cher ? Découpez le coupon de l’Enjoy Florida Magazine pour une location de flingue gratos à l’Orlando Gun Club (3721 Vineland Rd)…
Effectivement les méga-structures n’ont pas encore tout à fait réussi à tuer la Floride rétro qui fleure bon les marécages. La preuve avec l’Alligator Park Wild Florida et son concurrent Gatorland, fondé en 1949 à l’aube de la société des loisirs. Pour ne pas se retrouver out, la maison propose désormais de poser au plus près des crocodiles et même de laisser les bambins chevaucher de jeunes sauriens (le bec discrètement attaché par une bande invisible).

Le jai-alai,

Il s’agit de la version latino de la pelote basque, qui fit les beaux jours de la Floride des années 1960-80 et de ses parieurs, a tiré sa dernière révérence. Reste, à Longwood, le Sanford Orlando Kennel Club, inauguré en 1935, où les papis et mamies blancs cubains se retrouvent 5 après-midi par semaine pour assister aux courses de lévriers. 12 des 19 derniers dog tracks du pays sont en Floride, tous menacés par le déclin des recettes et les ONG animales.
Dans la fraîcheur d’une salle climatisée au look d’aéroport, des dizaines d’écrans TV retransmettent en direct courses canines et équestres – il faut bien (sur)vivre. Faites vos jeux : win (gagnant), place (placé 1 ou 2), show (placé dans les 3 premiers), quiniela (couplé), trifecta (tiercé) ou superfecta (quarté). Dehors, les tours de piste s’enchaînent autour d’un anneau d’¼ de mile.
Avec la distance d’élan, Born to do it, Champagne Flute, Stack of cash et leurs congénères couvrent les 550 yards (503 m) en… 31 secondes ! Aussitôt fini, direction la mini-piscine pour se rafraîchir. Et si vous adoptiez un lévrier retraité ?
D’autre part ceux qui ont connu la ville dans les années 1980-90 n’y retrouvent pas leur latin. Si l’Amérique change vite, Orlando semble faire constamment peau neuve. Le complexe de bars de Church Street Station, qui gravitait autour de l’emblématique saloon Rosie O’Grady’s et de ses danseuses remuant les gambettes sur des airs New Orleans, a cédé la place à un ensemble un peu mort remanié autour de la vieille gare – rénovée pour l’arrivée du SunRail.

Désormais, on regarde à l’ouest,

De l’autre côté de l’I-4, où l’Amway Center, QG des basketteurs des Orlando Magics (qui ont eu Shaquille N’Neal dans leurs rangs) et des hockeyeurs des Solar Bears, se dresse à côté de ce qui sera bientôt le nouveau stade de foot de la ville.
Du côté est, l’œil du lac Eola, entouré de sculptures, cligne dans la nuit au rythme des éclairs lumineux de sa fontaine, symbole de la ville. Les joggers en font assidûment le tour, avant de se laisser avaler par les rues ombragées bordées de belles bicoques en bois, certaines fort anciennes, aux toits léchés par les guirlandes des mousses espagnoles.

À quelques blocks

(pâtés de maisons) au nord-est, un autre monde s’ouvre : voici Little Saigon, coincé entre Shine et Mills, sur Colonial Drive, où l’on dévore un phở (soupe) fumant, avant d’aller faire provision de dragon fruits (pitayas) au Saigon Market voisin.
« Anybody who’s somebody lives in Winter Park ». Né au tournant du 20e s, le quartier, fondé par des nordistes fortunés venus se réchauffer au soleil de Floride. Il se décline en une multitude de lacs autour desquels rues et ruelles souvent pavées tissent leur toile. Une végétation toute tropicale y fait écho à de nobles maisons affirmant un style néoclassique ou Spanish revival. Inspiré de l’architecture des villes coloniales latino-américaines.
Ainsi ici résident businessmen, chirurgiens et héritiers divers. On les retrouve au matin sur Park Avenue, au volant de leur Rolls décapotable, ou sirotant un latte chez Panera en tapotant sur leur clavier.

C’est à Winter Park,

En 1885, que fut inaugurée la première université de Floride. le Rollins College, tenant d’une éducation universelle appuyée sur les arts classiques. Un siècle et quelques plus tard, artistes, poètes, musiciens et autres anthropologues planétaires viennent y donner des conférences pour le bonheur des quelque 3 200 étudiants. (il faut compter près de 50 000 $ de frais de scolarité par an !). On y visite le Cornell Fine Arts Museum. Un musée d’art et d’ethnographie largement doté par les dotations des riches résidents de Winter Park.

Au 445 North Park Avenue,

A deux pas de la bijouterie Filthy Rich. (riche comme Crésus). Le Charles Hosmer Morse Museum of Art abrite, lui, la plus belle collection de Tiffany au monde. Dont la chapelle créée par le maître pour l’expo universelle de Chicago en 1893. Gallé, Lalique, Majorelle sont là aussi, aux côtés d’une collection de peinture américaine.
À moins de 15 min du centre d’Orlando, s’étend la banlieue verte d’Apopka. Là où les dernières maisons de l’American way of life se perdent dans les stridences des insectes. Le Wekiva Springs State Park dessine une grande parenthèse de nature ramenant à la Floride des origines, débarrassée de son air conditionné.
A cet égard beaucoup viennent pour la source, qui alimente un vaste bassin aux eaux fraîches couleur émeraude. Et pour explorer les anfractuosités de son labyrinthe subaquatique. Mais il y a bien plus. Une rivière sinuant dans son propre dédale de méandres, prairies inondées, troncs enchevêtrés, palmiers et cyprès chauves.
En semaine, le lieu est presque désert. Le canoë, glissant doucement au travers de la cathédrale de verdure, surprend un héron bleu posté sur sa branche, puis d’autres. Des tortues s’alignent sur les souches. En saison sèche, le niveau de la rivière baisse par endroits jusqu’à forcer l’échouage. Une bonne occasion de patauger.
Dans ces conditions, par endroits, des berges dégagées invitent à l’escale, au pique-nique. À d’autres, il faut lutter contre le tapis colonisateur des jacinthes d’eau, d’où émerge le discret périscope d’un alligator à l’œil noir cerclé de jaune.
Une nuée passe : trois, quatre ibis blancs au long bec orange recourbé. Ils se posent un peu plus loin, se laissent approcher à quelques mètres et redéploient leurs ailes. Plus avant, c’est un aigle pêcheur qui fait bombance, perché juste au-dessus de la Wekiva, au mépris des stand-up paddles et des canoës.

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